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Opportunités et défis de la COP30 dans la lutte contre le changement climatique

Tous les regards sont tournés vers Belém, au Brésil, où se tient la 30ᵉ session de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP30), du 10 au 21 novembre 2025. Les observateurs espèrent que cette conférence produira cette fois des résultats encourageants, dans un contexte marqué par des inquiétudes croissantes sur le risque d’atteindre un point de non-retour dans la crise climatique, alors que le débat mondial est davantage dominé par les divergences et les conflits que par des zones de consensus sur un enjeu devenu plus urgent que jamais.

La COP30 est considérée comme un tournant potentiel dans les efforts de lutte contre le changement climatique. Avec la hausse des températures mondiales, l’insuffisance du financement climatique et la division des pays sur la manière d’accélérer la transition énergétique, les risques sont plus élevés que jamais. La conférence devrait également comporter des négociations difficiles qui pourraient façonner les politiques climatiques pour des décennies, notamment sur les questions de justice climatique, de protection de la biodiversité, de stratégies d’adaptation et du rôle des pays en développement.

La conférence préparatoire, tenue à la mi-octobre, a souligné l’importance de renforcer le multilatéralisme dans l’agenda climatique mondial et a insisté sur la nécessité de mettre en œuvre l’accord climatique comme moyen de renforcer le multilatéralisme. La présidence brésilienne de la COP30 a proposé trois objectifs principaux : renforcer le multilatéralisme et le système climatique dans le cadre de l’ONU, relier le système climatique à la vie quotidienne des populations, et accélérer la mise en œuvre de l’Accord de Paris de 2015 en promouvant les efforts et les ajustements structurels au sein des institutions capables de contribuer à cette démarche.

Financement climatique :

« Les impacts du changement climatique s’accélèrent, mais le financement de l’adaptation ne suit pas », a déclaré António Guterres, Secrétaire général de l’ONU, dans son message à l’occasion de la publication du Rapport sur l’écart d’adaptation 2025 par le Programme des Nations Unies pour l’environnement, quelques jours avant la COP30. Le rapport estime que le coût du financement nécessaire à l’adaptation dans les pays en développement atteindra environ 310 milliards de dollars par an d’ici 2035, montant pouvant s’élever à 365 milliards de dollars par an en se basant sur les besoins exprimés dans les contributions déterminées au niveau national (CDN) et les plans nationaux d’adaptation. En comparaison, les flux de financement public international pour l’adaptation ont atteint seulement 26 milliards de dollars en 2023, soit une baisse d’environ 2 milliards par rapport à 2022, ce qui signifie que les besoins en financement dépassent les flux actuels de 12 à 14 fois.

Si les tendances actuelles se poursuivent, l’objectif du Pacte climatique de Glasgow visant à doubler le financement public international pour l’adaptation par rapport aux niveaux de 2019 d’ici 2025 ne sera pas atteint, et le nouvel objectif collectif pour le financement climatique n’est pas assez ambitieux pour combler l’écart de financement.

Questions clés :

Cinq domaines principaux représentent à la fois des opportunités et des risques pour les institutions financières dans le domaine climatique :

  1. Plans climatiques nationaux plus solides avec des trajectoires d’investissement plus claires :
    La première évaluation mondiale dans le cadre de l’Accord de Paris a réduit l’augmentation prévue de la température mondiale de 4°C à une fourchette comprise entre 2,1°C et 2,8°C par rapport aux niveaux préindustriels. Bien qu’il s’agisse d’un progrès, cet objectif reste loin de la limite de 1,5°C. Les parties doivent soumettre des CDN plus ambitieuses, précisant les actions à mener jusqu’en 2035. Pour le secteur privé, la valeur réelle réside dans la traduction de ces plans en trajectoires sectorielles et opportunités d’investissement, appelées « contributions déterminées au niveau national investissables ». Sans cette clarté, mobiliser le capital privé à grande échelle sera difficile.
  2. Fournir un financement climatique aux pays en développement :
    Lors de la COP29 à Bakou, en Azerbaïdjan, l’année dernière, les pays ont convenu d’un nouvel objectif collectif : les nations avancées se sont engagées à fournir au moins 300 milliards de dollars par an aux pays en développement d’ici 2035, et à mobiliser jusqu’à 1,3 trillion de dollars par an provenant de sources publiques et privées multiples. La « feuille de route financière de Bakou à Belém », dirigée par les présidences de la COP29 et COP30, vise à définir comment atteindre cet objectif en attirant un capital privé à grande échelle pour atténuer et s’adapter aux impacts climatiques dans les pays en développement. Le Programme des Nations Unies pour l’environnement – initiative financière (UNEP FI) soutient cet objectif en formant une alliance mondiale représentant des milliers d’institutions publiques et privées pour proposer des recommandations concrètes.
  3. Stimuler l’investissement durable et climatiquement approprié :
    Les dispositifs d’information environnementale et sociale (ESG) ont ouvert la voie à des opportunités commerciales concrètes et à des taxonomies de financement durable plus avancées. Ces systèmes permettent aux gouvernements et acteurs privés de définir ce qui constitue un investissement durable ou climatique, renforçant la confiance des investisseurs, facilitant les flux de capitaux transfrontaliers et garantissant la crédibilité du financement climatique. La COP30 devrait présenter de nouveaux plans nationaux et régionaux dans ce sens, renforçant la mobilisation mondiale des financements conformément à l’Article 2.1(c) de l’Accord de Paris, qui vise à « aligner les flux financiers sur une trajectoire conduisant à des émissions de gaz à effet de serre faibles et à un développement résilient au climat ».
  4. Finaliser les règles pour le marché mondial du carbone soutenu par l’ONU :
    L’Article 6.4 de l’Accord de Paris ouvre la voie au premier marché mondial réglementé du carbone. Bien que des marchés volontaires existent déjà, ce mécanisme créera un système de commerce de crédits carbone vérifiés sous supervision de l’ONU. Presque tous les pays ont exprimé l’intention d’utiliser ces crédits pour atteindre leurs CDN. Pour le secteur financier, cela offre des rôles potentiels en tant que financeurs de programmes générant des crédits carbone, acheteurs pour atteindre des objectifs de réduction des émissions, vendeurs pour les institutions dépassant leurs objectifs, ou prestataires de services de gestion des risques et d’assurance pour les transactions de crédits. Après l’accord sur les lignes directrices clés à la COP29, Belém se concentrera sur la finalisation des règles techniques avant l’ouverture du marché.
  5. Coordonner une transition juste et inclusive :
    La transition loin des combustibles fossiles doit être juste et inclusive. En juin 2025, les parties ont progressé dans la définition d’un cadre pour une transition équitable. La COP30 devrait adopter le mécanisme proposé par Belém, un cadre dans le cadre de la CCNUCC pour mettre en œuvre le programme de transition équitable au niveau national et régional. Ce travail montrera comment gouvernements et secteur privé peuvent placer les populations au cœur des transitions nationales et sectorielles, en intégrant les parties prenantes, en créant des emplois et des formations, et en adoptant des stratégies de diversification.

Cercles de leadership :

La COP30 a lancé quatre cercles de leadership pour exploiter les enjeux clés de l’avenir de l’action climatique et de la mobilisation mondiale. Ces groupes facilitent les discussions sur le financement climatique, les peuples et communautés autochtones, la gouvernance climatique et la mobilisation mondiale.

Ils visent à accélérer la mise en œuvre de l’Accord de Paris et à promouvoir l’action climatique mondiale. Chaque groupe fonctionne indépendamment et en parallèle des négociations, soutenant la présidence de la COP30. Le Secrétaire général de l’ONU et le Président brésilien dirigent une « évaluation éthique mondiale », incluant des leaders politiques, culturels, autochtones, communautaires, entrepreneurs et religieux.

Le Ministre brésilien des Finances dirige le « cercle des ministres des finances » pour la feuille de route Bakou-Belém afin de fournir 1,3 trillion de dollars par an aux pays en développement d’ici 2035, rassemblant ministres, experts, secteur privé et société civile pour des consultations régulières sur le financement climatique. Ce groupe soutiendra la présidence de la COP et préparera un rapport de feuille de route en collaboration avec la COP29.

La Ministre des Peuples autochtones dirige le « cercle des peuples » pour accroître la représentation des communautés autochtones, traditionnelles et afro-descendantes, veillant à ce que les savoirs traditionnels soient respectés et intégrés dans les discussions internationales sur le climat.

Pour la première fois, le quatrième cercle rassemble les anciens présidents de la COP depuis la COP21 (2015), dirigé par l’ancien ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius, pour renforcer la gouvernance climatique mondiale et accélérer la mise en œuvre de l’Accord de Paris.

Engagements et répercussions :

Malgré les efforts pour parvenir à un consensus sur l’action climatique, des divergences importantes subsistent. La Chine s’est engagée à réduire ses émissions nettes de gaz à effet de serre de 7 à 10 % d’ici 2035, à porter la part de l’énergie non fossile à plus de 30 % de sa consommation totale, et à multiplier par six sa capacité de production éolienne et solaire par rapport à 2020, en plus de mesures soutenant la transition énergétique.

L’Union européenne continue de progresser vers l’énergie propre, avec une réduction des émissions de 40 % depuis 1990, et reste le plus grand bailleur de fonds mondial pour le climat, allouant jusqu’à 300 milliards d’euros pour soutenir la transition énergétique mondiale. Cependant, les engagements actuels restent insuffisants ; les plans nationaux existants réduiraient les émissions de seulement 2,6 % d’ici 2030 par rapport à 2019, bien en deçà de l’objectif mondial de 43 %, nécessaire pour maintenir le réchauffement sous 1,5°C.

En revanche, certaines sources américaines indiquent que les États-Unis n’enverront aucun haut responsable à la COP30. En octobre, Washington a menacé de sanctions et de restrictions de visa contre les pays votant en faveur d’un plan de l’Organisation maritime internationale pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le transport maritime, reflétant la politique actuelle américaine qui limite fortement le rôle des États-Unis dans les accords climatiques internationaux.

Conclusion :

La COP30, accueillie par le Brésil cette année, représente un moment clé pour l’action climatique, passant de la négociation à la mise en œuvre réelle des engagements climatiques. Elle devra relever le défi de traduire les objectifs en flux financiers concrets et d’intégrer les résultats du Global Stocktake dans une nouvelle génération de CDN plus ambitieuses et inclusives. Cette édition de la conférence est donc particulièrement sensible, notamment face à l’écart croissant entre les engagements actuels et ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris et éviter le point de non-retour climatique.

Mohamed SAKHRI

Je suis Mohamed Sakhri, fondateur de World Policy Hub. Je suis titulaire d’une licence en science politique et relations internationales, ainsi que d’un master en études de sécurité internationale. Mon parcours académique m’a offert une solide base en théorie politique, affaires mondiales et études stratégiques, me permettant d’analyser les défis complexes auxquels sont confrontés aujourd’hui les États et les institutions politiques.

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