Les interrogations sur le sort des combattants étrangers en Syrie ont refait surface, notamment après la déclaration ambiguë du président syrien actuel, Ahmad Al-Shara, lors de sa rencontre avec Emmanuel Macron le 7 mai. Le retour de ces combattants représente un risque accru pour la sécurité régionale, en particulier en raison de l’implication de militants d’Asie centrale dans diverses factions syriennes. Cela alimente les spéculations sur les efforts de réinsertion, révélant une double menace : terrorisme et extrémisme idéologique.
Dans un contexte géopolitique volatile—marqué par la chute du régime de Bachar al-Assad, la guerre israélienne à Gaza et au Liban, le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, les tentatives de l’EI de reprendre pied en Syrie et en Irak, et la restructuration récente de l’appareil de défense syrien—l’intégration de combattants étrangers, notamment le Tadjik Saifuddin Tajbayev, pourrait raviver le djihadisme au Moyen-Orient via des extrémistes d’Asie centrale.
Signes d’un Retour en Force
Avec l’arrivée au pouvoir d’Ahmad Al-Shara—une figure liée au djihad—la dynamique des combattants étrangers, surtout ceux d’Asie centrale, a évolué. Les indicateurs clés incluent :
Propagande en Expansion : Les militants d’Asie centrale utilisent des plateformes comme Telegram pour promouvoir le djihad en syriaque et en russe. Le 28 avril, une vidéo montrant des combattants (liés à Hay’at Tahrir al-Sham) appelant les russophones à une “guerre sainte contre Moscou et Téhéran” a émergé. Ces images, montrant des entraînements militaires, suggèrent une nouvelle stratégie de recrutement transnationale. Cette campagne coïncide avec les efforts de l’EI pour délégitimer le gouvernement Al-Shara.
Afflux de Combattants d’Asie Centrale en Syrie : Des milliers ont rejoint le conflit syrien après 2015, s’alliant à l’EI, à l’opposition syrienne, aux groupes soutenus par la Turquie ou aux forces d’Assad. Le Comité de sécurité nationale du Tadjikistan a recensé près de 1 900 citoyens engagés dans des groupes djihadistes, principalement l’EI. Malgré les programmes de rapatriement (Ouzbékistan, Kazakhstan, Kirghizistan), certains retournés restent actifs—soit en Afghanistan, soit dans des réseaux clandestins locaux. Des groupes comme le “Bataillon Imam Boukhari” opèrent toujours sous l’égide de Hay’at Tahrir al-Sham.
Intégration dans l’Appareil Sécuritaire Syrien : En janvier, le militant tadjik Saifuddin Tajbayev—ancien membre du Parti de la Renaissance Islamique (interdit au Tadjikistan)—a été nommé chef des opérations au ministère syrien de la Défense. Présentée comme une “intégration d’étrangers expérimentés”, cette nomination souligne le rôle des Asiatiques centraux dans la chute d’Assad. Six des 50 postes clés de la défense syrienne seraient occupés par des étrangers, alimentant les craintes d’une militarisation extrémiste. Tajbayev pourrait superviser des camps d’entraînement visant les forces russes en Syrie.
Implication dans le Terrorisme Global : Des Tadjiks ont été impliqués dans des attaques en Allemagne (2023), en Iran (2024) et dans un assaut contre un bâtiment municipal à Moscou (mars 2024). Huit Tadjiks ont été arrêtés aux États-Unis pour liens avec l’EI, tandis que trois Ouzbeks étaient détenus aux Émirats pour le meurtre d’un rabbin israélien (novembre 2024).
Conséquences pour la Sécurité Régionale
Le retour des combattants menace :
- Fragmentation de l’État : Les djihadistes au gouvernement (ex. Tajbayev) sapent l’intégrité militaire, risquant des conflits internes.
- Résurgence de l’EI : Les divisions idéologiques entravent l’unité, relançant des bases d’entraînement dans le nord-ouest syrien.
- Déstabilisation de l’Asie Centrale : Les retournés exploitent les failles (ex. frontière afghane du Tadjikistan), boostant recrutements et réseaux extrémistes.
- Exploitation des Tensions Locales : Les militants profitent des crises socio-économiques (ex. région autonome du Gorno-Badakhshan).
- Cibles Étrangères : Les attaques contre des intérêts russes/turcs pourraient prolonger les opérations anti-insurrectionnelles.
- Effets Transfrontaliers : Les opérations régionales pourraient accroître la dépendance aux puissances extérieures, érodant la souveraineté.
Lutte Antiterroriste en Asie Centrale
Les programmes de réinsertion (ex. “Mehr” en Ouzbékistan, “Zhusan” au Kazakhstan) peinent à convaincre. En avril, Tachkent a accueilli un sommet historique des chefs des renseignements pour harmoniser les stratégies contre le terrorisme, le trafic de drogue et les cybermenaces. L’OTSC a renforcé la frontière afghane du Tadjikistan, tandis que l’Ouzbékistan et le Kazakhstan modernisent leurs armées avec l’IA. Le Tadjikistan, faute de ressources, reste à la traîne.
Conclusion
La sécurité de l’Asie centrale reste fragile. Si les djihadistes reprennent pied en Syrie, l’Afghanistan—déjà un bastion de l’EI—deviendrait leur prochaine base. Une coopération régionale se renforcera à court terme, mais les disparités nationales (ex. leadership ouzbek vs. dépendance tadjike) laissent des failles exploitables par des acteurs externes.

Subscribe to our email newsletter to get the latest posts delivered right to your email.
Comments